Transformation des métiers : les enjeux du numérique

Je lis le énième message de mon opérateur télécom après celui du célèbre site de covoiturage, de la SNCF, de mon parking préféré, de ma banque, de ma boutique préférée, du site de e-commerce blacklisté par mon conseiller financier, de mon ostéo favori, de mon assurance habitation, de mon conseiller en Energie...

Et là je prends la pleine mesure de la révolution digitale. Plus qu’en marche, elle est en train d’entamer un sprint qui laissera plus d’un sur le carreau, d’autres le souffle coupé mais pour ceux qui arriveront en bout de course sans y perdre des plumes, ce sera le graal. Ce ne sera plus jamais comme avant, comme diraient certains, ce sera mieux. D’autres utiliseront plutôt le mot différent. Et puis d’autres encore essayeront tant bien que mal d'être indifférents. Le gap entre les générations Alpha, Z, Y, M ou WWII se creusera encore.

Des nouveaux métiers émergent de cette r/évolution, laissant le système éducatif et formatif un train en arrière. Les cartes des agences physiques dans le secteur bancassurance sont redistribuées. Le storing traditionnel va laisser la place aux nouveaux modes de consommation de proximité, express et à distance.

La carte n’est pas le territoire !

L’expérience client est à revoir sur toute la chaîne de distribution. Le « Bonjour Madame, bonjour Monsieur » à l’entrée de votre boutique, c’est fini depuis un bon bout de temps. Maintenant, le pari de la fidélisation se fait dès le téléchargement de l’app sur notre smartphone. Bientôt, U et X seront les lettres qui apparaîtront le plus fréquemment dans les moteurs de recherche de l’alphabet de nos enfants. Les métiers derrière les 3 piliers que sont la santé, la justice et l'éducation s'essoufflent. Les perspectives d'évolution verticale et horizontale changent dans tous les secteurs, ceux essentiellement portés par les métiers traditionnels : Comptabilité, Supply, Commerce, Industrie, Médias, Assurance, on va tous y passer.


Même l'amour devient virtuel. Créant de nouveaux métiers.



Et les Maths et les Sciences n’auront jamais autant le vent en poupe que ces prochaines années. Big data, IA, algorithmes et courbes majestueuses, injonctions d’une crise à venir ou d’un hourra de joie derrière cet écran, qui, il y a encore 20 ans, virait au bleu sous un léger grésillement.

Les modes de recrutement changent, notre SOI digital prend de plus en plus de place dans notre CV, au-delà des compétences techniques dont le processus d’obsolescence n’a jamais été aussi véloce.

Investir sur l’humain n’a jamais été aussi porteur.

Pour aller un cran plus loin, même les soft skills dont on vante tant l’importance doivent être revisitées à travers le numérique. A la question comment te comportes-tu en situation de crise, il faudra ajouter désormais comment communiques-tu ?

Terminé les réunions à l'ancienne en Comex, là où les murs cachent les débordements, les craquages de nerfs, la culpabilité, les coups de pression, la déresponsabilisation, le « tu qui tue », mais aussi les prises de décision rapides, les tapes dans dos, la poignée de main, le serrage de coude, les contrats moraux…

Le virtuel encourage la culture de l’écrit et des traces qui restent, la cicatrisation numérique et la résilience. On va devenir des experts en PNL digital. L’équation de la performance et de l’humain n’aura jamais aussi complexe à résoudre sur le terrain. Le service de crise va devenir celui le plus fréquenté dans les prochaines années. Les métiers de gestionnaire de crise aussi ne seront plus tout à fait relégués au statut de « dernier recours ». Des cellules transverses doivent être désormais créées dans chaque structure, petite et grande.

Enfin, fini le poste de travail traditionnel. Avec les outils qui se développent (ERP, télécoms, automatisation..), nos compétences évoluent à la même vitesse. Ou pas. Ces derniers jours, j’entends des pans de services entiers se mettre en chômage partiel, pas pour des raisons conjoncturelles (baisse de la demande, aménagement à distance impossible etc..), mais parce qu’ils manquent tout simplement de moyens pour permettre à leurs équipes de travailler from home. On est en 2020 ! Certaines entreprises vont devoir revoir leur format de collaboration à distance de façon inexorable pour ne pas péricliter.

Les modes de management aussi changent. Nous sommes tous désormais des managers digitaux.

Comment être un manager participatif à distance ? Comment communiquer efficacement ? Quels outils devons-nous utiliser ? Quelles infos partager ? Comment motiver mon collaborateur qui se trouve en ce moment à Varsovie ou à Madrid ? Comment dois-je intégrer la multi-culturalité dans ce nouveau paradigme du management ? Quel management fonctionnel en local mettre en place ? Comment aménager le poste de travail de ma collaboratrice sur ses dernières semaines de congé mat ? quel accompagnement au changement ? Quel temps de travail dois-je faire respecter alors que je ne maîtrise pas ce qui se passe de l’autre côté de l’écran ? En quoi suis-je désormais utile dans ma fonction de manager à l’ère de la surinformation et de l’autonomisation ?

Les managers devraient tous désormais avoir cette culture du questionnement digital. DRH, Directions des organisations et Transfo numérique, Dirigeants, il est plus que temps de se poser ces questions et d’enclencher les actions dans ce sens.

Il y aura des écueils, certes, mais les erreurs aussi s’accompagnent et s’anticipent.

Cette explosion du numérique dans nos modes de vie au quotidien m’amène à cette question qui se pose depuis plusieurs années au sein des comités de Directions Générale, Strat, Opérationnelle, Transfo, RH ou Numérique : Comment accompagnez-vous la transformation des métiers ? Comment accompagnez-vous ces nouveaux paradigmes ? Quelle vision dans un environnement aussi volatile avec une équation matricielle à plusieurs inconnues ? En fait, ce n’est pas demain, c’est aujourd'hui que tout se passe. C’est déjà là. Concrètement, on fait quoi maintenant ?